Et quand viendra le fils de l’homme… +

Mt 25,31-46 — Parole de Dieu

Le sappel

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No 74
journal du sappel / Décembre 2008 Journal

Bousculée par les ados.

J’ai senti à quel point je méconnaissais la réalité de la vie quotidienne des ados, et le terreau dans lequel ils grandissent : l’univers sonore, la violence des quartiers, leurs peurs, etc.

J’ai réalisé le fossé qu’il peut y avoir entre l’impact de gestes ou paroles pour les ados et le poids plus léger que j’aurais tendance à leur accorder, dans un sens comme dans l’autre. Je sens que je suis loin de parvenir à décoder leurs attitudes et paroles. Aurélie me dit qu’elle peut dire des choses à Kévin que nous, animateurs, ne pouvons pas dire, puisque qu’on ne parle pas vraiment le même langage. Elle se rend compte de la nécessité d’une certaine « traduction », pour que certains messages puissent passer.

Par Aurélie j’ai approché l’ambiance des quartiers, où tout se sait, et où il faut être sans cesse vigilant pour qu’une rumeur ne puisse pas naître, rumeur qui peut en un rien de temps pourrir la vie. La confiance des ados m’a également frappée. Quelquefois, je me demande d’où vient cette confiance si rapide, peut-être faudrait-il également la décoder. Comment se fait-il qu’Elodie, que je connais à peine, dise à Sébastien qu’elle peut me parler parce que je la comprends ? J’ai été touchée par la bonté profonde des ados, ainsi que par la bonne humeur, le désir de joie, palpable à travers tout le groupe (je pense par exemple à la première soirée sous l’orage). Pas facile de me situer de façon juste dans la relation, pour ne pas tomber dans le piège d’une simple relation d’amitié ; à plusieurs reprises, j’ai du repenser le sens de ma présence en tant que membre du Sappel. Je crois que nous ne sommes pas là en tant qu’éducateurs, mais en tant que chrétiens désirant les rejoindre là où ils en sont, et porteurs de la lumière du Christ. Pas simple en réalité !

Le plus fragile

Je pense à Sébastien toujours dans la crainte, sur la défensive, comme s’il avait peur d’être en permanence tourné en ridicule, en dérision. Lorsque Kevin a regardé les fleurs avec la loupe de botaniste, il l’a invité à faire de même, en lui disant « tu vas voir, c’est génial ». Mais Sébastien n’a pas voulu regarder, persuadé d’une entourloupe, d’un sale coup préparé. Il n’a pas voulu croire que c’était vraiment pour lui montrer quelque chose de beau. Du coup, je lui ai mis la loupe dans la poche, et il a regardé les fleurs plus tard, quand il était seul.

Il est incapable de se poser, autant dans sa tête que dans son corps, tout est en mouvement, tout le temps. Au temps de bilan mercredi matin, Mickaël, Patricia et moi étions assis, il n’a pas pu. Il est resté debout, au mieux accroupi. A ce moment-là, ce n’était pas pour faire son malin ou par opposition, réellement il ne pouvait pas s’asseoir.

Chez lui tout sort d’une façon brutale, incontrôlée. Je le vois perdu dans ce qui le traverse, complètement dépassé, incapable de mettre des mots sur ses sentiments. J’ai été frappé de le voir pleurer, bouleversé, après une empoignade avec un animateur. Comme un tremblement de terre, un verre de cristal qui éclate. Ça m’a paru terrible. Durant la veillée, le fait qu’il puisse jouer son propre personnage en faisant rire tout le monde m’a émerveillée. Inespéré ! Je me suis demandée comment une telle chose était possible… Jamais je n’aurais pu imaginer cela.

Marie Marchand

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