Publications pour la Journée Mondiale des Pauvres
Emission TV du groupe du Sappel de Namur, et article de Nicolas Lhernould évêque de Constantine-Hiponne
Le samedi 12 novembre, journée mondiale des pauvres, un atelier " groupe biblique ", a eu lieu au sanctuaire de Banneux (Belgique).
Nicolas Dumont (Solidarité Namur) a interviewé Soeur Madeleine Bikeli Machuli et Etienne de Ghellinck sJ, en lien avec la communauté du Sappel.
Comment des personnes en situation de pauvreté partagent l'Evangile ?
Saint Augustin et la 6ème Journée Mondiale des Pauvres
Article de Nicolas Lhernould évêque de Constantine-Hiponne nov 2022
La sixième édition de la Journée Mondiale des Pauvres, instituée en 2017 par le pape François, aura lieu cette année le dimanche 13 novembre. Cette date marque aussi l’anniversaire de naissance de saint Augustin, en l’an 354. Dans son message à l’occasion de cette journée, le Pape François écrit : « Il est urgent de trouver de nouvelles voies qui puissent dépasser l’idée de ces politiques sociales ‘conçues comme une politique vers les pauvres, mais jamais avec les pauvres, jamais des pauvres, et encore moins insérée dans un projet réunissant les peuples’ (Fratelli tutti, n. 169) » (Message pour la 6ème Journée Mondiale des Pauvres, n.5).
Augustin, en son temps, développait cette idée : l’attention aux plus pauvres ne peut se résumer à des gestes d’assistance, aussi généreux et nécessaires soient-ils : « Ton superflu est le nécessaire du pauvre. […] Tu ne sais pas la saveur d’un repas assaisonné par la faim » (Sermon 61,12-13). Cette attention touche à la relation d’égal à égal entre personnes créées à l’image et à la ressemblance de Dieu : « Ce pauvre que tu vois est ton frère, vous êtes issus des mêmes parents, d’Adam et d’Eve […] : non plus que le pauvre, tu n’as pour te couvrir qu’un même ciel, qui est le toit du monde. Rien ne t’appartient de tout ce qui te distingue du pauvre ; tout cela est étranger pour toi ; c’est en cela qu’il faut te voir, et non pas voir cela en toi-même. » (Commentaire sur les Psaumes 72,13).
Jésus a voulu s’identifier aux plus pauvres : « Déjà voici l’hiver, par la grâce de Dieu : songez aux pauvres, cherchez à revêtir la nudité de Jésus-Christ. […] Écoute ce qu’il dira au moment du jugement : ‘Ce que vous avez fait à l’un de ces petits, vous me l’avez fait’ (Mt 25,40). Chacun de vous s’attend à recevoir le Christ assis au Ciel : voyez-le d’abord gisant sous les portiques ; voyez-le souffrant la faim et le froid ; voyez-le indigent et étranger » (Sermon 25,8). Accueillir les plus pauvres, c’est donc accueillir Jésus lui-même. L’hospitalité conduit à la reconnaissance. Ainsi en fut-il à Emmaüs : « Si tu veux avoir la vie, fais ce que firent les deux disciples pour arriver à reconnaître le Seigneur. Ils lui donnèrent l’hospitalité […] Toi aussi, arrête l’étranger, si tu veux reconnaître ton Sauveur. L’hospitalité leur rendit ce que l’infidélité leur avait fait perdre, et le Seigneur se montra à eux au moment de la fraction du pain » (Sermon 235,3-4).
Si Jésus est le centre de la communauté chrétienne, les plus pauvres doivent donc aussi être au centre avec lui. En partant des pauvres, la communauté grandit, la communion qu’elle cherche à vivre, la fraternité qu’elle construit avec tous. Chacun a quelque chose à donner. Se reconnaître mutuellement pauvres, en besoin les uns des autres, permet d’entrer dans une dynamique de don réciproque qui édifie : « Les pauvres, eux aussi, ont de quoi s’aider les uns les autres : celui-ci peut prêter ses jambes au boiteux ; celui-là ses yeux à un aveugle pour le conduire ; un autre peut visiter les malades ; un autre ensevelir les morts. Tous peuvent servir leurs frères et il serait vraiment malaisé de trouver quelqu’un qui n’aurait rien à donner à un autre » (Sermon 91,9). Chacun est concerné; En effet : « N’allez pas croire que les pauvres sont seulement ceux qui manquent d’argent. Dans qui que ce soit, un pauvre se cache » (Commentaire sur les psaumes 125,12).
Réciproquement, « plus grandit le sens de la communauté et de la communion comme style de vie, et plus la solidarité se développe » (Pape François, Id., n. 5), comme chemin qui oriente vers Dieu : « Quand tu étais malade, ton prochain te portait ; tu es revenu à la santé, porte donc, à ton tour, ton prochain […] Emporte ton lit ; après avoir été porté par lui, porte ton prochain, et marche afin d’arriver jusqu’à Dieu […] Marche, si tu as appris à le porter à ton tour » (Commentaire sur l’Evangile selon saint Jean 17,11) ; comme chemin par lequel se construit une fraternité durable : « On dit que les cerfs, quand ils marchent en troupe ou quand ils nagent pour passer en un autre lieu, s’entraident pour porter les bois qui chargent leurs têtes. L’un d’eux marche en avant et celui qui le suit pose sur lui sa tête et soutien à son tour celui qui suit et ainsi de suite, jusqu’à la fin de la troupe. Mais, lorsque celui qui portait seul en avant le fardeau de ses bois se trouve fatigué, il se retire en queue de la troupe pour qu’un autre lui succède et reprenne sa charge, tandis que pour lui, posant à son tour la tête sur un autre, comme les autres faisaient, il se remet de sa fatigue. C’est ainsi que, portant tour à tour ce qui les charge, ils achèvent leur voyage sans jamais se quitter » (Commentaire sur les psaumes 41,4).
Que la coïncidence de cette Journée Mondiale des Pauvres et de l’anniversaire d’Augustin aide à vivre cette invitation du Pape François : « En tant que membres de la société civile, maintenons vif l’appel aux valeurs de liberté, de responsabilité, de fraternité et de solidarité. Et comme chrétiens, retrouvons toujours dans la charité, dans la foi et dans l’espérance le fondement de notre être et de notre agir » (Pape François, Id. n. 5).
+ Nicolas Lhernould