Quand on est tous ensemble à se parler, on est en vie éternelle.

Daniel — Parole des pauvres

Le sappel

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No 67
journal du sappel / Avril 2006 Journal

La rencontre

La rencontre

Depuis quelques mois j’accompagne un jeune couple qui vit de grandes difficultés. Chaque rencontre est une aventure que nous vivons à trois. C’est un chemin sur lequel Dieu nous conduit chacun où il en est. Je crois que l’image qui conviendrait le mieux pour expliquer ce que nous vivons est celle du plongeur en apnée. En fait, ce dont Monique a besoin quand je viens, ce n’est ni d’une personne qui l’aide à gérer ses problèmes, ni quelqu’un qui la console ou lui donne des conseils. Ce qu’elle veut c’est une personne qui descende avec elle dans ses enfers, car toute seule, elle s’y perdrait...Comme le plongeur qui doit affronter la descente vers le froid et la nuit des profondeurs de l’océan, elle doit descendre au plus profond d’elle-même, de ses blessures, de son cri existentiel, pour y rencontrer Dieu qui au cœur même de cette souffrance est là et l’aime. Le plongeur pour descendre à besoin d’un filin tendu entre le fond et la surface. Ce filin est son point de repère qui va l’accompagner jusqu’au fond, lui permettre de ne pas s’égarer et de remonter. Sans lui, le risque serait fort de se noyer.Ce filin, c’est moi. Je reste là avec elle, sans rien dire la plupart du temps. Et comme le filin au fond de l’océan éprouve lui aussi le froid et la nuit, la descente dans ses enfers ne me laisse pas indemne. Sa souffrance, sa blessure, ses peurs et sa honte, je les reçois, et le Christ me donne la force à ce moment là de ne pas partir avec elle, mais comme le filin, de rester tendu pour qu’elle ne se perde pas et puisse avancer dans ses profondeurs, là où il l’attend.

Le filin qui sert de repère Je rencontre alors ma propre pauvreté, mes limites, mes faiblesses. Les mains vides devant le mystère de sa vie et de sa souffrance, je suis pauvre et nous pouvons nous rejoindre toutes les deux. Si le filin pour rester tendu entre la surface et le fond doit être solidement fixé, c’est le Christ qui, pour moi, est le seul point d’encrage. Arrivée au fond, c’est dans la Parole de Dieu que se fait la rencontre avec celui qui est le seul à pouvoir la comprendre comme elle le dit si bien, qui est le seul à avoir une réponse à son cri. Là, j’ai la grâce d’être témoin de la force de la Parole, et de la voir agir concrètement sous mes yeux. Car à cet instant, il n’y a plus aucun écran, aucune barrière, aucun « filtre » et tout se passe comme dans la parole du prophète Isaïe (Is 55, 10) « [...] comme descend la pluie ou la neige, du haut des cieux, et comme elle ne retourne pas là-haut sans avoir saturé la terre, [...] ainsi se comporte ma parole du moment qu’elle sort de ma bouche : elle ne retourne pas vers moi sans résultat [...] ». Elle peut alors remonter à la surface, différente, transformée et sûr que Dieu l’aime et la comprend, que lui seul peut la sauver. Jésus est l’Emmanuel, « Dieu avec nous », avec Monique et moi lorsque nous nous rencontrons. Dieu présent au plus profond de nos enfers où il nous accompagne. Si je suis le filin qui sert de repère à Monique, celui qui lui tient la main et qui la conduit, c’est le Christ. Et en même temps il est Jésus, « Dieu sauve » qui nous libère de nos chaînes intérieures. De « sa cage intérieure » comme le dit Monique.

Andrée L. Juin 2005

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